🎯 Objectif
Évaluer les mouvements et la fonction du diaphragme à l’échographie afin de :
- Détecter un mouvement paradoxal ou absent ;
- Surveiller l’effort ventilatoire et la fatigabilité ;
- Guider le sevrage de la ventilation mécanique ;
- Différencier une insuffisance respiratoire d’origine pulmonaire d’une cause neuromusculaire.
⚙️ But clinique : déterminer si le diaphragme « travaille » réellement — et dans quelle mesure.
🧰 Sonde et Réglages
- Sonde : convexe (2–5 MHz) en première intention ; linéaire (7–12 MHz) chez le sujet mince ou pour étude fine.
- Préréglage : Abdomen ou Poumon.
- Profondeur : 12–18 cm à droite, 8–12 cm à gauche.
- Foyer : au niveau du dôme diaphragmatique (3 à 5 cm sous la base pulmonaire).
- Mode : B-mode pour repérage anatomique → M-mode pour la mesure d’excursion.
- Gain : moyen, afin de bien distinguer la ligne hyperéchogène du diaphragme.
- Doppler couleur (optionnel) : utile pour différencier les mouvements du diaphragme de ceux du poumon basal.
💡 Astuce : commencer par le côté droit, le foie offrant une fenêtre acoustique idéale.
📍 Position du Patient
- Respiration spontanée / sevrage ventilatoire : position semi-assise à 30–45°.
- Patient ventilé : décubitus dorsal.
- Côté droit vs gauche :
- Droit : exploration plus aisée grâce au foie.
- Gauche : plus difficile, gênée par l’air gastrique.
- Enfant / nourrisson : décubitus dorsal ou légèrement surélevé.
🧭 Repérage du Diaphragme
Côté droit (préférentiel)
Placer la sonde convexe sur la ligne médio-claviculaire, juste sous le rebord costal.
Orienter la sonde vers la tête et légèrement en arrière.
Visualiser successivement :
- Le foie (structure homogène hypoéchogène) ;
- La ligne hyperéchogène du diaphragme ;
- La base pulmonaire qui bouge avec la respiration.
Côté gauche
Placer la sonde sur l’espace intercostal inférieur, ligne axillaire moyenne.
Utiliser la rate comme fenêtre acoustique.
Attention à ne pas confondre les mouvements de l’air gastrique avec ceux du diaphragme.
🎯 Le diaphragme apparaît comme une ligne brillante et courbée, séparant le foie ou la rate (en dessous) du poumon aéré (au-dessus).
💡 Quand Évaluer la Mobilité Diaphragmatique
- Détresse respiratoire ou dyspnée : évaluer l’effort et la symétrie.
- Sevrage de ventilation mécanique : apprécier l’excursion spontanée.
- Post-chirurgie thoracique ou cardiaque / traumatisme : rechercher une paralysie phrénique.
- Pathologie neuromusculaire : suivre la force contractile et la fatigue.
- Asymétrie clinique de l’expansion thoracique : différencier paralysie, atélectasie, ou épanchement pleural.
🎞️ Modes d’Évaluation
A. Mode B — Analyse Qualitative
Observer le mouvement cranio-caudal du diaphragme durant la respiration.
Comparer les deux côtés.
- Descente douce et régulière à l’inspiration → contraction normale.
- Mouvement minimal ou absent → faiblesse ou paralysie.
- Mouvement paradoxal (ascension à l’inspiration) → paralysie phrénique complète.
🧠 Le mouvement paradoxal traduit une pression intrathoracique négative qui « aspire » le diaphragme vers le haut au lieu de le faire descendre.
B. Mode M — Analyse Quantitative (Excursion)
Placer le curseur M-mode perpendiculairement au diaphragme visible en B-mode.
Lors de l’inspiration, le diaphragme se rapproche de la sonde, provoquant une onde ascendante sur le tracé.
Mesurer l’excursion entre la fin d’expiration et la fin d’inspiration.
Valeurs de référence :
- Respiration calme : 1 à 2 cm.
- Inspiration profonde : 3 à 6 cm.
- Ventilation passive : 0,5 à 2 cm.
- Enfants : valeurs variables selon l’âge (~1 cm au repos).
📈 Une excursion diminuée traduit une faiblesse ou une hypostimulation ; une excursion paradoxale indique une paralysie.
🩻 Épaisseur Diaphragmatique et Fraction de Raccourcissement
Évaluation plus fine à la sonde linéaire, dans la zone d’apposition (8ᵉ–9ᵉ espace intercostal).
Mesurer l’épaisseur du diaphragme (Tdi) en fin d’expiration et en fin d’inspiration.
Calculer la fraction de raccourcissement (TF) :
TF = \frac{(T_{insp} - T_{exp})}{T_{exp}} \times 100
- TF > 20–30 % : contractilité normale.
- TF < 20 % : dysfonction diaphragmatique.
- Absence d’épaississement : paralysie ou dénervation.
⚙️ Utilisée en réanimation pour prédire la réussite du sevrage ventilatoire.
🧩 Interprétation Clinique Intégrée
- Dyspnée avec mouvements symétriques normaux : cause pulmonaire prédominante.
- Dyspnée avec mouvement absent ou paradoxal d’un côté : atteinte phrénique, épanchement, ou lésion traumatique.
- Échec de sevrage ventilatoire : excursion < 1 cm ou TF < 20 % → fatigue diaphragmatique.
- Post-chirurgie cardiaque : hémidiaphragme ascensionné avec mouvement paradoxal → paralysie phrénique transitoire.
- Sepsis sévère : hypermobilité initiale, puis amplitude réduite → signe de fatigue musculaire et d’hypoperfusion.
⚠️ Erreurs Fréquentes et Pièges
- Confusion entre mouvement du poumon et du diaphragme : vérifier la présence du foie ou de la rate sous la ligne hyperéchogène.
- Courbe oblique en M-mode : mauvaise orientation du faisceau → réaligner perpendiculairement.
- Absence de signal à gauche : gêne par l’air gastrique → utiliser un espace intercostal plus latéral ou examiner le côté droit.
- Artefact miroir du poumon basal : confirmer par observation dynamique.
- Surestimation d’excursion : balayage trop rapide ou mauvaise échelle → recalibrer avant mesure.
🩺 Conclusion
L’échographie du diaphragme offre une fenêtre directe sur la mécanique ventilatoire.
En pratique :
- Le mode B évalue la symétrie et la direction des mouvements.
- Le mode M mesure la force et l’amplitude de la contraction.
- La fraction d’épaississement quantifie la fonction musculaire réelle.
💬 En résumé :
- Le diaphragme qui descend : normal.
- Le diaphragme qui ne bouge pas : fatigue.
- Le diaphragme qui monte à l’inspiration : paralysie.
🔎 Cette observation simple, rapide et non invasive permet de suivre l’efficacité du travail respiratoire et d’adapter la prise en charge du sevrage ou de la ventilation en temps réel.
